Nous sommes submergés par nos boues de stations d’épuration. La dispersion de celles-ci directement dans les champs étant quasiment interdite il a fallu trouver d’autres solutions pour s’en débarrasser. Le brulage, destiné pour produire de l’énergie fut choisi. Vite accusé d’émettre du CO² il fut remplacé par une solution semblant beaucoup plus adaptée, amender nos sols avec du compost élaboré avec nos déjections, une économie circulaire chère à certains écologistes.
Sur le papier ce compostage semble être le Graal. On mélange des boues de stations d’épuration avec des déchets verts. Ces derniers permettant d’aérer ce mélange et de favoriser le travail des bactéries, produisant un produit noble destiné à amender les sols. Mais ça c’est sur le papier seulement.
Car pour que ce produit soit vertueux, il faut que les déchets verts et les boues qui le composent soient irréprochables. Ce qui est loin d’être le cas.
Cette méthode aurait été révolutionnaire au début du siècle dernier. Avant l’élaboration de milliers de substances chimiques pharmaceutiques et industrielles. Avant l’utilisation souvent à outrance des médicaments, avant le bond de l’automobile, avant l’utilisation massive des pesticides.
Pour les boues de stations d’épuration, le grand public croit qu’il s’agit seulement des excréments, dont d’ailleurs il ne soupçonne pas la dangerosité. Ce que les gens ignorent, c’est que dans la majorité des stations d’épuration (celles à réseau unitaire), est traité tout ce qui transite dans les égouts. Les excréments, contenant toutes les molécules de nos armoires à pharmacie (antibiotiques, œstrogènes) qui ont transité par le corps, auxquels s’ajoute éventuellement des virus, sans oublier tout ce qui est versé dans les éviers des ménages (produits lessiviels, produits d’entretien, eau de lavage des sols, déboucheurs de canalisation et bien d’autres).
À ces effluents ménagers s’ajoutent aussi l’eau souillée par le rejet direct à l’évier de polluants divers utilisés par les entreprises, les ateliers, les restaurants et les commerces des cités.
Mais ça n’est pas tout. Arrivent dans ces stations les eaux de pluies (avec tout ce qu’elles contiennent), les eaux de ruissellement des toitures, des parkings, des rues, du nettoyage de ces rues (marchés, foires agricoles) et de toute la pollution générée par les véhicules (fuites des liquides, des particules de pneumatiques, d’embrayage et de freins).
Comme il n’y en pas encore assez, à ces boues urbaines s’ajoutent celles de stations d’épuration d’usines. Et là c’est beaucoup plus nébuleux et très inquiétant car on ignore et les produits contenus, et la dangerosité des boues livrées, du fait des autocontrôles autorisés par l’État aux entreprises françaises.
Quant aux déchets verts, ils viennent des déchetteries, qui en réceptionnent beaucoup depuis l’interdiction du brulage. Ils ne sont pas contrôlés à réception. Ce sont donc des déchets souillés de tout ce qui peut s’ajouter lors des tontes et des coupes qui sont livrés dans les usines de compost (plastique, caoutchouc, métaux ferreux et non ferreux, goudron du bord des routes, béton, poussières diverses etc.).
Mais d’autres déchets sont autorisés dans l’élaboration du produit. Provenant d’usines pharmaceutiques, d’usines de cuir et de la fourrure, d’usines de chimie, de cimenteries, d’abattoirs, de papeteries, les déchets municipaux de marchés et de nettoyage des rues etc.
La liste est longue, elle fait 8 pages et fait froid dans le dos.
L’eau de nettoyage des rues finit dans les stations d’épuration et les déchets ramassés dans ces mêmes rues finissent dans les bacs de déchets verts.
Il est difficile de croire que les 150 000 substances chimiques de synthèse existantes vont toutes être supprimées par le compostage. Surtout si comme dans l’usine SEDE Environnement de Tarascon le compost est élaboré naturellement sans apport de chaleur, avec une hygiénisation rarement atteinte.
Ce qui en fait un produit fini extrêmement douteux.
Les odeurs pestilentielles qui se dégagent des ces composts agricoles sont la signature d’un produit mal élaboré. Le compost bien fait ne sentant rien, à part la terre. Un sac de compost commercialisé sent bon, un tas stocké sur un terrain agricole pue. L’élaboration devrait être la même mais par profit il n’en est rien.
La transformation des boues en compost est un job, pas un acte philanthropique. Ça n’est pas pour rien que la filière est très souvent la propriété de grands groupes, souvent acteurs dans le traitement de l’eau. Une concurrence féroce existe entre eux. Une OPA inamicale l’a montré il y quelques mois. Cette concurrence est salutaire pour les municipalités qui veulent se débarrasser de leurs boues, mais elle est néfaste pour l’environnement, car pour garder une marge confortable, c’est un produit au rabais qui la plupart du temps élaboré.
Il faut savoir que ce compost a été pendant des années un déchet et non un produit, du fait de sa dangerosité supposée. A ce titre il ne pouvait pas être commercialisé. Mais pour augmenter encore leurs profits, les acteurs de la filière ont tout fait pour ce déchet devienne un produit. Ils sont parvenus à le faire normer (NFU 44-095 et NFU 44-051).
Quelle différence ? Dans ce cas le fabricant n’est plus responsable de l’utilisation de ce compost. Ni de sa fréquence d’utilisation, ni des quantités utilisées, ni du stockage. Ça devient l’affaire de l’utilisateur. Des normes très commodes pour le fabricant.
Et c’est grâce à une des deux normes qu’on trouve en jardinerie des sacs de compost élaborés avec toutes les bonnes choses citées plus haut. Avec des jardiniers amateurs pensant cultiver des légumes de qualité alors qu’ils amendent leurs terres avec des déchets potentiellement dangereux.
SEDE Environnement Tarascon , alias Provence Compost a demandé d’agrandir son usine pour produire du compost non normé. Malgré une enquête publique qui a mobilisé des dizaines d’opposants dont 3 municipalités, l’enquêteur à donné comme souvent une un avis favorable.
Avis suivi par le préfet, comme bien souvent.