La filière forêt bois

L’industrie forestière a eu un rôle important dans la décision du législateur de sauver Fibre Excellence coûte que coûte au profit de son propriétaire opportuniste.

Dès la grève du personnel de l’usine le 21 septembre 2020, la corporation est montée au créneau, jouant même les briseurs de grève en organisant avec leurs camions des opérations escargot sur plusieurs grandes routes des Bouches du Rhône. Fustigeant, voire menaçant les grévistes.

Nathalie Triboulet, vice-présidente du syndicat des exploitants forestiers a même déclaré qu’il n’était pas normal qu’une poignée de grévistes puisse bloquer toute la filière.

arbre

Sans se rendre compte que certes les salariés de l’usine avaient des rémunérations confortables mais que compte tenu des risques induits par le délabrement de l’usine, leur paye représentait parfois « le salaire de la peur ».

La filière forêt-bois a revendiqué 3 000 emplois menacés rien que pour elle. Chiffre honteusement faux puisque Patrick Jeambar, membre du conseil d’administration de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée et Corse et ancien de l’industrie papetière déclarait que l’usine outre le personnel, faisait travailler entre 1 500 et 2 000 personnes (sous-traitants, approvisionnement en bois, etc.).

Considérant que d’avoir quadruplé le nombre des emplois réels n’était pas assez exagéré, ils se sont mis à communiquer sur 10 000 emplois pour leur seule filière.

Une tricherie destinée à faire croire aux politiques et au public qu’une faillite de l’usine laisserait sur le carreau 10 000 acteurs de leur corporation. Ça a marché puisque journalistes et personnalités politiques ont sans vérifier cru puis colporté ces faux chiffres. Car il est beaucoup plus valorisant pour un politique de communiquer sur le sauvetage de 10 000 emplois plutôt qu’un millier.

Ce chiffre de 10 000 est toujours avancé par les défenseurs de l’usine, particuliers comme politiques. Pour ces derniers c’est en connaissance de cause qu’ils annoncent ce chiffre et c’est donc de la désinformation volontaire. 

Il est inacceptable que les dirigeants forestiers qui pleuraient le plus avaient et ont toujours d’autres débouchés que l’usine. Ceux qui n’avaient que l’usine Fibre Excellence comme client étant des inconscients et de piètres gestionnaires. Et l’usine encore une fois hors la loi car tombant sous le coup d’abus de dépendance économique. Et que dire sur les fournisseurs qui n’avaient même pas de contrat…

Ces braves forestiers avaient peut-être misé sur un soutien indéfectible de l’État à l’usine. Le coup est passé près mais pour finir force est de constater qu’ils ont eu raison.

Une grande partie de la forêt française est détenue par propriétaires privés. Beaucoup sont des gens influents financièrement et politiquement, les relations de certains d’entre eux ont sans doute pesé sur la décision de l’État d’aider l’usine sans modération.

Ils ont malgré tout eu peur de l’opinion publique. Pour preuve les pressions exercées sur Hugo Clément. Dans son émission « Sur le front des forêts françaises », celui-ci a reçu, 48 heures avant sa diffusion sur France 5, des mises en demeures lui demandant des supprimer deux reportages. Ils ont été retirés de la version télévisée.

On les trouve sur le site Facebook d’Hugo Clément. Ils ont été mis l’un quelques jours après la diffusion du reportage sur France 5, l’autre le lendemain du verdict du procès. 

La première séquence évoquait les nombreux suicides d’agents de l’ONF, découragés de voir la forêt détruite sans pouvoir l’empêcher, la seconde montrait le délabrement de l’usine Fibre Excellence et son procès.

Ces menaces sont une atteinte au droit d’information et ont montré la puissance du lobby forêt bois.

L’industrie de la pâte à papier française utilise 5% du bois produit par la filière forêt-bois de l’hexagone. Une dizaine d’usines majeures sont clientes, dont 2 plus importantes que Fibre Excellence qui représente moins de 1% de la production. Plutôt que de chercher de nouveaux débouchés, ces chefs d’entreprise sans état d’âme sacrifient l’environnement et la santé de milliers de riverains en vendant du bois à une ruine industrielle déliquescente.

Du fond de leurs forêts, ils ne subissent aucune nuisance et peuvent respirer à pleins poumons.

L’avenir du bois n’est pas sa combustion, qui rejette stupidement dans l’atmosphère tout le CO² durement emmagasiné, mais une utilisation responsable et écologique de cette ressource. Comme l’utilisation du bois pour la construction, le CO²  restant piégé.

La combustion du bois libère, à énergie égale, 2 fois plus de CO² que le fioul et 1,5 fois plus que le charbon.

Et le discours qui consiste à seriner que le bois brûlé dans l’usine est du déchet qui ne peut servir qu’à rien d’autre est un mensonge. Les tas de superbes billes de bois stockées dans l’usine en témoignent. Ainsi que le reportage diffusé sur France 5.

Il ne faut pas oublier non plus les 30 000 camions qui circulent annuellement pour approvisionner l’usine en bois, ayant parfois couvert  plus de 250 km, et faisant 5 jours sur 7 la queue devant l’usine, souvent moteurs tournants. Alourdissant encore le bilan carbone et la pollution aux NOx. Mais qui s’en soucie !

Le prix du bois ayant considérablement augmenté et du même coup leurs bénéfices, les forestiers s’honoreraient à réfléchir à une exploitation plus vertueuse d’un de nos trésors nationaux.

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